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Paul
Claudel
-
L'échange -
par Joseph
Llapasset
Toutes
nos références renvoient à : Paul Claudel, L'échange, Folio n° 911 , Édition
2001.
Ce
que Marthe dit d'elle. (page 2)
|
-
Elle dit les
conséquences de son engagement, du don total de soi qu'elle a fait
au risque paraître une épave dans les mains de Louis Laine pour
peu qu'il ne tienne pas son propre engagement. Gardons bien dans
l'esprit que Marthe n'est pas encore gagnée par l'intérêt de
l'esprit, de la raison.
=> Elle dit le don
de soi: elle s'est donnée sans retour.
Je ferai ce que tu voudras, Louis. (page 15) |
Je suis à toi et ma passion est de faire mon
service (page 24) |
Je ne suis pas libre, et je suis sous tes pieds.
(page 25) |
Je me suis donnée ... (page 68) |
=> Elle exige son
dû.
La femme sans l'homme que ferait-elle? (page 20) |
Mais je suis ici pour te la (la vie) redemander.
(page 30) |
... il n'y a pas d'autres femmes que moi. (page
30) |
O Laine, tu m'es unis par un sacrement. (page 80) |
=> Elle présente
ses qualités d'intuition, elle présente aussi comme une conscience
morale, un intuition directe qui ne passe pas par les méandres de la
discursivité. C'est l'évidence.
J'écoute. (page 21) |
L'œil est fait pour voir et l'oreille pour
entendre (page 43) |
Je te connais du moins d'une manière où tu ne
peux tromper, comme un mouton qu'on pèse l'ayant acheté (page
25) |
Elle
présente aussi ses défauts:
Je suis jalouse! (page 31) |
Ce n'est pas ma faute si je ne suis pas plus
intelligente. (page ... ) |
Car je t'ai été une compagne pénible et
douloureuse (page 105) |
=> Pourtant elle
pressent obscurément ce qui apparaîtra en toute clarté dans la
deuxième version:
elle représente le salut pour Laine.
Reste! il y va de ta vie ! (page 104) |
Et moi je te défendrai, je te sauverai. (page
...) |
Tout
au long de la première version, Marthe dit pauvrement sa fidélité, sa
sincérité, qui élève son mariage à tout autre chose qu'un contrat
que l'on pourrait rompre avec un quelconque dédommagement. Ayant donné
ce qui n'a pas de prix, sa liberté naturelle, ce qui ne peut se vendre,
ce qui n'a pas de prix, elle exige de Laine qu'il accède à
l'autonomie, au travail bien fait que nécessite l'enfant qu'elle porte
en elle. Elle le convie donc à la non réciprocité de l'amour, à
s'investir totalement dans une oeuvre: toute oeuvre exige le don de soi
au delà des petits calcul d'intérêt: en se perdant on se sauve. C'est
le meilleur de chacun que l'épanouissement de l'enfant exige. C'est
dire que le don de la vie exige d'abord une communion qui est à
l'origine de l'enfant: dans cette communion chacun apprendra à aimer ce
qu'il fait et finira par éprouver la douceur du devoir accompli. c'est
bien le message essentiel que Claudel veut nous faire parvenir même si
cela se noie parfois dans la crise intérieure provoquée par
l'intrusion de la lumière que figure la première version de la pièce.
On comprendra que Marthe, après la mort de Louis Laine se tourne vers
Thomas, celui qui fait bien son travail, le pilier qu'il lui faut, pour
lui demander de l'aide: ce que Marthe dit d'elle c'est donc sa richesse
et son manque, son désir d'une plénitude à laquelle seule la
rencontre d'un autre qui relève le pari lui permettra d'accéder:
chacun se donnant pleinement à une tâche commune: donner la vie.
©
Joseph
Llapasset
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