Bien s'orienter: l'acte de penser implique l'argumentation dans la mesure où
celui qui pense, pense pour tous et a le souci de convaincre tous ceux qui
veulent bien penser avec lui. Il faut donc écarter le "psychologisme" qui
cherche à réduire la croyance en Dieu ou l'athéisme à des considérations
personnelles et qui pense l'homme plutôt que Dieu.
Que monsieur X soit croyant pour échapper à l'angoisse de la mort nous
renseigne beaucoup plus sur monsieur X que sur le problème: "peut-on
penser Dieu?".
On évitera de se rabattre sur la chimie de la religion (largement évoquée dans
philagora: La religion dans la
rubrique Philo-dans-la-poche).
Peut-on
Est-il possible ou est-il
impossible de... les conditions sont-elles réunies ou peuvent-elles
être réunies?
penser
=>Être l'auteur d'un
dialogue intérieur: c'est le même qui interroge et qui répond
(Platon)
=>Mouvement: de la crédulité au doute, à la croyance: penser c'est
affirmer un rapport entre des concepts en utilisant la raison:
"l'esprit agit en tant qu'il affirme" (Lagneau).
=>C'est douter, affirmer, aspirer à ...
Dieu
Prendre une définition qui
soit accordée par tous: athées, croyants, philosophes, savants...
Ens quo nihil majus cogitari possit: L'être tel que rien de plus grand ne peut
être pensé (Saint Anselme, Proslogion T34)
Vers la problématisation...
Comment le fini peut-il penser un infini divin sans que sa pensée soit fondée
par le concept d'une réalité qui seule peut le fonder?
Peut-on penser sans affirmer Dieu?
Peut-on affirmer Dieu sans que ce soit Dieu
qui s'affirme en nous?
Pour la recherche des idées...
Si penser c'était poser Dieu, on ne pourrait que penser
Dieu nécessairement.
I. La raison permet de penser Dieu comme
illusion ou comme objet de foi.
a)
La raison pure, pouvoir d'unification.
Le concept prend ensemble la diversité (cum capio)
L'entendement pose le jugement et le raisonnement et par là unifie les
concepts.
La raison poursuit cet effort d'unification au delà de l'expérience
(métaphysique) et dans son mouvement d'unification produit des idées à quoi
rien de sensible ne correspond:
-le moi unifie tous les états intérieurs. -Le monde unifie tous les états correspondants à l'extérieur. -Dieu unifie le moi et le monde par la création.
Si la raison se reconnaît dans le monde
humain parce qu'elle l'a rationalisé, lorsqu'elle veut ériger les idées en
réalité absolue (hypostasier) elle prouve n'importe quoi, une chose et son
contraire (antinomies de la raison pure) car elle affirme l'existence de ce à
quoi rien de sensible ne correspond, l'existence d'illusions: or rien ne peut
lui apparaître de ce qui est inaccessible à l'expérience.
La raison pure me
permet donc de penser Dieu comme un principe régulateur mais pas comme
existence. Or comme la première vérité c'est l'existence, la raison qui
s'élève à l'idée de Dieu comme à ce qui peut être pensé comme existant ou
n'existant pas s'élève donc à ce qui ne peut être affirmé.
b)
La raison pratique: que dois-je faire?
Selon Kant la conscience morale nous permet de trouver l'absolu en nous dans la
bonne volonté: en effet le devoir, comme impératif
catégorique, a sa raison
d'être en lui même et non dans un intérêt sensible: or l'absolu est ce qui a
sa raison d'être en soi.
=>Du même coup le bonheur comme
satisfaction complète devient impossible puisque l'impératif catégorique
exige indépendamment de tout intérêt: on ne peut donc que mériter le bonheur
car le bonheur n'est pas possible dans ce monde puisque la vertu est exigée au
détriment de la nature.
=>On est donc amené à faire trois hypothèses qui donnent tout leur sens au
sacrifice exigé par le devoir: ce qu'il faut accorder pour que le sens soit. Ce
sont les postulats de la raison pratique.
-L'immortalité de l'âme: sans elle à quoi servirait d'avoir mérité le
bonheur? De plus mériter le bonheur demande plus qu'une vie humaine la plupart
du temps. -Dieu qui rendra possible le bonheur en accordant concept et nature et en
faisant ainsi disparaître leur conflit qui déchire l'homme. (On a objecté à
Kant que cette espérance enlevait la pureté du devoir...). -Le Dieu de la raison pratique est donc un objet de foi qui donne un sens et qui
autorise l'espérance: Dieu est pensé comme une exigence pour que l'obéissance
à l'impératif catégorique ait un fondement et une fin.
II. La pensée permet d'affirmer Dieu comme
existence.
a)Reprenons la définition de Saint Anselme: Ens
quo nihil majus cogitari possit: L'être tel que rien de plus grand ne peut être pensé
(Saint Anselme, Proslogion T34)
Saint Anselme s'adresse à des
moines habités par cette pensée intérieure et qui se demandent si quelque
choses d'extérieur correspond à cette pensée.
Saint Anselme ne tire pas la réalité du concept, l'existence de l'essence mais
leur montre qu'en partant du concept d'une réalité humaine qui aspire à la
perfection malgré une nature imparfaite, il est possible de passer au concept
de la réalité qui seule peut fonder cette aspiration au coeur d'une nature
imparfaite:
autant dire que pour Saint Anselme la pensée affirme Dieu parce qu'elle doute
et en doutant elle aspire à une perfection absolue: c'est donc de la pensée
intérieure des moines que jaillit une certitude, née d'une idée telle que je
ne peux même pas penser que Dieu n'existe pas:
"L'être qui est tel que rien de plus grand ne peut être pensé ne peut
être dans votre seule intelligence: en effet, s'il était dans la seule
intelligence, on pourrait imaginer un être comme lui qui existerait aussi dans
la réalité et qui serait plus grand que lui.
Si donc il était dans la seule intelligence l'être qui est tel que rien de
plus grand ne peut être pensé serait tel que quelque chose de plus grand
pourrait être pensé!
Cette idée est telle que je ne peux même pas penser qu'il n'existe pas!"
b)
Descartes. L'intuition de ma
pensée implique nécessairement l'existence de Dieu: je doute donc Dieu est.
(attention il s'agit pas d'une citation de Descartes mais d'une explication de
sa pensée).
=>Dans l'établissement de toute
pensée, il y a le moment du doute:
l'intuition qu'il manque quelque chose à la
connaissance pour être parfaite =
toute pensée discerne imparfait et parfait.
OR, le principe de causalité de la
raison me permet d'affirmer qu'il n'y a rien sans cause et qu'il n'y a rien de plus
dans l'effet que dans la cause. Car s'il y avait quelque chose de, plus dans l'effet que
dans la cause, il y aurait un effet sans cause!
=>Il y a donc une cause de
l'idée du parfait qui contient autant que l'effet.
-si je doute je ne peux pas être cause car le doute est signe d'imperfection.
-un être parfait peut seul être cette cause: Dieu.
Autres pistes:
Epicure, pense Dieu dans la Lettre
à Ménécée (2ème texte) en utilisant le principe de contradiction de la
raison.
Pascal, voir la distinction: infini
divin/infini mathématique.
Avec Hegel... Claude Bruaire,
L'affirmation de Dieu, lecture incontournable.
Il est toujours bien entendu que ceci n'est pas
un corrigé, mais une aide pour la recherche des idées. Le devoir reste à
faire. -Aller à
"Le pari de Pascal"
par Jules Lachelier. -Aller à la page Lachiéze-Rey:
le moi le monde et Dieu.