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Hector: un magnifique soldat
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Du côté des
Troyens.
"Hector au casque étincelant"
domine l'Iliade de sa haute stature. Sa personnalité relègue au second
plan ses compagnons et ses alliés.
Enée, Sarpédon, Glaucos, en nous limitant aux plus remarquables, n'ont
rien à envier à leurs adversaires pour l'adresse, l'intelligence, la
force ou la générosité, mais le poète s'étend moins sur leurs actions
que sur celles d'un Ajax, d'un Diomède ou d'un Ménélas.
Les grands
guerriers achéens ont en effet à occuper le terrible vide laissé par la
défection de leur champion, Achille, tandis que les Troyens sont
constamment soutenus et stimulés par leur chef.
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Voilà, d'entrée de jeu, la comparaison ouverte entre les deux héros!
Allons-nous les opposer ici comme ils furent opposés sur le champ de
bataille, et comme on le fait souvent? Sont-ils, au fond, si différents?
Commençons
par faire connaissance avec Hector.
1 C'est un
magnifique soldat.
"Le
premier au combat, parmi les Troyens dompteurs de cavales".
"Je
me connais en combats et tueries, dit-il.
Je sais mouvoir à droite, à gauche la peau de bœuf séchée, mon
endurant outil de guerre. Je sais charger, dans la mêlée des chars
rapides. Je sais danser, au corps à corps, la danse du cruel Arès".
Il ne pourrait envisager de ne pas guerroyer, et, malgré le chagrin
que lui cause l'angoisse de sa femme, il aurait honte de se soustraire au
danger: "j'ai appris à être
brave en tout temps et à combattre aux premiers rangs des Troyens, pour
gagner une immense gloire à mon père et à moi-même".
Adversaire loyal,
il prend soin de fixer les règles du duel qui doit l'opposer à un
champion achéen:
"Si c'est lui qui de moi triomphe... qu'il me dépouille de mes armes
et qu'il les emporte... mais qu'il rende mon corps aux miens... Si c'est
moi au contraire, ... ses armes, je l'en dépouillerai... mais son
cadavre, je l'irai rendre aux nefs..." (on sait combien les
guerriers homériques tenaient à honorer les corps de leurs camarades tués
au combat)
Lorsque, Ajax et lui ayant fait dans ce duel la preuve de leur égale
valeur, les dieux leur ordonnent de cesser la lutte, il tient à
rendre hommage à l'Achéen: "Le Ciel t'a octroyé la grandeur
et la force, sans compter la sagesse... à la javeline, tu es le premier
de tous les Achéens". Et tous deux échangent des présents, en
signe d'estime mutuelle.
Son drame, ici, c'est d'avoir contre
lui Achille, que sa violence, sa force, son armenent et les faveurs
divines rendent invulnérable, et mortellement dangereux.
Il lui arrivera, gagné par une terreur bien légitime, ou même averti
par les dieux, de s'enfuir pour l'éviter, mais quand la rencontre se
montre inéluctable, il s'y lance avec toute sa force: "Je sais
que tu es brave et que je suis bien au-dessous de toi. Mais tout ceci
repose sur les genoux des dieux. Si je ne te vaux pas, ne puis-je, du
moins, t'arracher la vie, en te touchant de ma pique? Mon trait, à
moi aussi, a déjà su être perçant".
Plus tard, l'armée troyenne, mise en déroute par Achille, court se réfugier
dans la ville, les Achéens approchent des murailles. "Seul,
Hector reste là". Il a pesé différentes solutions, et il a
estimé qu'il devait tenir tête au farouche poursuivant.
Quand il comprend que les dieux
l'ont abandonné, il assume son dernier combat:
"Voici maintenant le destin qui me tient. Eh bien non! je
n'entends pas mourir sans lutte, ni sans gloire, ni sans quelque haut
fait, dont le récit parvienne aux homme à venir", et il s'élance
de toute son énergie sur celui qui va le tuer.
2
Il joue pleinement son rôle de chef.
Nous
avons vu la désinvolture avec laquelle Agamemnon avait fait passer son
intérêt propre avant celui des Achéens, en offensant Achille, et
nous avons entendu plus d'une fois ses compagnons lui reprocher le peu de
part qu'il prenait aux combats. (il est vrai que les Grecs font ici une
guerre de conquête, et que leur sol n'est pas menacé).
Hector, lui, se dévoue à son pays
sans réserve. Son sort et celui de
ses concitoyens ne font qu'un, puisque la lutte qu'il mène vise à sauver
sa patrie d'un danger mortel : "Il nous faut désormais ou
les exterminer, ou voir la haute Ilion par eux détruite jusqu'en ses
fondements et ses citoyens massacrés".
Il organise des attaques, envoie des éclaireurs, veille à la
sécurité, prévoit le ravitaillement, sans oublier les prières
collectives aux dieux.
Observateur attentif, il élabore une stratégie et la modifie suivant
les circonstances. Ainsi, il profite de l'absence d'Achille pour mener à
bien son projet de détruire la flotte des envahisseurs. Une
fatigue dans le camp ennemi, un signe positif de Zeus l'incitent à
poursuivre son avantage, tandis qu'un rapport numérique trop défavorable
peut l'amener à se replier.
Par deux fois, cependant, son
excessive confiance lui fait négliger l'avis d'un guerrier prudent. Grand
est son remords, quand il le réalise: "Polydamas... me
conseillait de diriger les Troyens vers la ville... et je ne l'ai pas
cru!...Comme cela eût mieux valu, pourtant... J'ai, par ma folie,
perdu mon peuple".
Sur le terrain, il est
partout à la fois. Il passe en
revue ses troupes: "il va tout le long des lignes, progressant pas
à pas pour les tâter: ploieront-elles...?"
Il ne plaint pas sa peine, il partage les efforts, les fatigues,
les dangers: "Hector a
saisi une poupe et ne la lâche pas: il en tient le bois embrassé et
lance un appel aux siens: "Apportez le feu, et tous, en masse, réveillez
la bataille!"
Sa voix puissante stimule
l'ardeur des soldats: "Troyens et Lyciens et Dardaniens
experts au corps à corps! Montrez-vous des hommes, amis! rappelez-vous
votre valeur ardente. Je vois que Zeus en sa bonté nous promet la
victoire et une gloire immense". Tantôt il fait miroiter l'appât
du butin, tantôt il menace les traînards: "Aux nefs! en avant!
Laissez les dépouilles sanglantes (s'emparer des armes du vaincu était
pourtant un droit reconnu). A celui
que je verrai autre part que près des nefs, je promets la mort sur
place".
Il n'hésite pas à se proposer
comme champion, pour tenter de mettre fin au conflit meurtrier qui
oppose les deux camps.
Pour les Troyens comme pour les Achéens, il est la référence.
Son nom inspire aux siens confiance et affection, aux Achéens terreur et
rancune.
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le fléau des grecs.
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