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Rubrique philo-poche, cours sur Philagora http://www.philagora.net/philo-poche/
La
perception
- (pour
mieux comprendre)
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II.
Le
parcours.
Disons tout d'abord pour
éviter tout contresens, que "per" ne signifie pas ici à
travers mais parfaitement, complètement. "ception" a pour origine
"capere" (= prendre).
Percevoir désigne,
classiquement, une action pleinement achevée qui consiste à s'emparer de,
au sens de recevoir, prendre connaissance de quelque chose d'extérieur par
les sens, de ce qu'il y a ici et maintenant:
Exemple: Je vois un
arbre.
La caractéristique de la perception est d'être immédiatement externe: par
elle nous accédons à la signification: il y a un arbre. C'est donc par
elle que la réalité de l'être nous apparaît. Percevoir c'est être
immédiatement hors de soi et du même coup présent à soi.
C'est dire
avec l'incontournable Bergson de "Matière et mémoire" que notre
perception est originairement dans les choses "plutôt que dans
l'esprit, hors de nous plutôt qu'en nous." (page 246). Mais cela ne
signifie pas que nous ne soyons pas avec elle, que nous ne l'accompagnions
pas: la présence à soi, l'épreuve de soi, est la condition sans laquelle
ce mouvement d'accès à la réalité ne serait pas pour la conscience qui
l'
effectue.
= Dire
que la perception est le résultat d'une construction, c'est la confondre avec l'oeuvre de
l'entendement qui, certes, lui apporte beaucoup mais ne saurait la générer.
= Dire
que la perception est une reconnaissance, une occasion de se
ressouvenir, c'est la confondre avec la mémoire qui lui ajoute beaucoup
mais à la manière d'une parure qui serait vanité sans le corps qu'elle
revêt.
= Dire
que la perception est imagination ... ou hallucination, c'est la
confondre avec ce qui la remplace, ce qui la provoque, ce qui l'auréole,
mais ne saurait en tenir lieu: comment l'absence pourrait-elle donner autre
chose que l'absence? Or la perception est donation de la présence.
Par
l'entendement, la mémoire, l'imagination, l'esprit collabore à
l'objectivité de plus en plus définie d'une représentation. Mais sans une
matière que donne une perception originaire cette activité de
l'entendement ne saurait s'exercer.
Cela signifie
que la représentation n'est identique à la perception que pour un
idéalisme absolu et impénitent qui confond la réalité et sa conception
de la réalité. Cela revient à identifier la représentation et l'être et
à se passer de la perception. Pourtant toute perception rappelle à
l'idéaliste son incarnation et par là la nécessité de limiter son
idéalisme.
Enfin,
même si toute langue implique une conception du monde la perception ne
saurait être réduite à un pré découpage de l'environnement qui
n'intéresse que la représentation élaborée, par exemple le spectre des
couleurs, avec plus ou moins de finesse: que je découpe l'environnement ne
signifie pas que, en deçà de ce découpage linguistique,je n'accède pas
à monde commun selon une perception originaire qui met en présence d'une
chose, qui la donne dans sa réalité même si ce n'est jamais dans sa
totalité.
Toute ces tentatives de réduction nous détournent de
la perception et nous détournent donc de notre enquête sur la
perception: dans un survol elles croient saisir une réalité alors
qu'elles la remplacent par un objet artificiellement construit: puis
elle se vantent de retrouver dans cet objet ce qu'elles y ont mis:
enfin, emportées dans un tel mouvement ces tentatives aboutissent à
la définition a priori d'une perception parfaite: en effet la
déduction triomphe puisqu'on tire tous les éléments qu'on a
préalablement introduits dans la définition: prendre complètement.
Mais la perception n'a même pas été reconnue ... |
Cours de Joseph Llapasset ,
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