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Singularité |
Objectivité |
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L' HISTOIRE |
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Utilité |
Sens |
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L'
HISTOIRE
Singularité =
Tout discours qui veut se présenter comme un savoir justifié doit
pouvoir accéder à un objet: l'objet c'est ce qui est jeté devant
avec impartialité. Pour construire un objet avec une réalité mouvante,
il faut une certaine répétition de caractère: l'objet est général
dans la mesure où il a des caractères communs avec des objets
semblables: par exemple, la révolution en général que la sociologie
peut étudier. Mais l'histoire comme devenir
passé est la succession d'événements singuliers, uniques.
Bien entendu, l'événement est transformé en fait, ce que l'historien
fait en faisant l'histoire. La distance entre l'événement et le fait est
d'autant plus grande que la prise en considération de l'originalité, de
la singularité est difficile. Or, l'événement historique, par ses trois
caractères (successif, singulier,
réalité morte) semble défier
tout savoir et à plus forte raison toute science, si la science ne porte
que sur du général.
On distinguera soigneusement l'histoire comme narration du passé et la
mémoire qui suppose la survivance de témoins. Ce qui sera dit de
l'Histoire ne sera pas pertinent pour la mémoire. Par exemple dire qu'il
n'y a pas de leçons de l'histoire ne signifie pas que les témoignages
des survivants ne peuvent être utilisés pour éviter le retour d'un
génocide en inventant par exemple un droit d'intervention humanitaire.
Objectivité =
Si l'objet est ce qui est jeté devant, si l'objectivité est ce qui jeté
devant avec impartialité de telle manière que cela puisse
entraîner l'accord de tous (universalité) par des démonstrations et des
preuves, on comprend que l'objectivité en histoire ne soit jamais donnée
mais soit toujours le fruit d'une conquête.
Pour ce qui est de l'impartialité, le principal obstacle vient de ce que
celui qui cherche, le sujet, est en même temps l'objet de la recherche
dans la mesure où il se penche sur ses propres racines. L'astrophysicien
qui pense les frontières, qui balance entre le fini et l'infini parle de
sa condition mais ne parle pas de lui. Un changement de théorie n'est pas
un drame mais un progrès. En histoire celui qui se penche sur la
Résistance, la collaboration, le rôle de Pétain dans la première et la
deuxième guerre mondiale, ou encore qui cherche à savoir si Alain
Fournier a fait partie ou non de soldats qui ont attaqués un hôpital
militaire, celui qui cherche à ajuster un discours à la succession des
événements ne peut pas être "intéressé" au résultat de sa
recherche. L'impartialité, quand on parle de soi ou des siens est donc
toujours une conquête.
N'exagérons pas à partir de ces cas particuliers. Dire que l'historien,
celui qui fait l'histoire, ne doit être d'aucun temps et d'aucun pays
reviendrait à lui enlever tout culture et à le rendre aveugle. Un peu de
sympathie semble donc nécessaire.
Sur le plan de l'objectivité
au sens de la correspondance entre un
discours et son objet il
est possible de distinguer l'histoire
originale de
celui qui raconte une action à laquelle il a participé: son récit sera
le récit de quelqu'un d'engagé, qui a pris parti et dont le champ de
conscience est limité à la particularité de sa situation. (Revoir la
critique interne qui permet dans une certaine mesure d'obtenir
l'objectivité :dans le cours sur l'histoire) ET
L'histoire réfléchie de
l'historien qui, à l'aide de sa raison, croit trouver un ordre dans une
succession. L'ordre vient, bien entendu, très souvent de la raison de
l'historien et l'optimisme rassurant de ses grandes synthèses doit être
démontré deux fois.
Utilité = Pour ce qui
est de tirer des leçons de l'histoire, la narration
historique et le devenir
passé qu'elle raconte est bien inutile.
Hegel remarque que les conditions sont tellement mobiles, que les
problèmes sont tellement contemporains, qu'il ne peut pas y avoir de
leçons de l'histoire. (Reportez-vous au discours sur la première
décade de Tite Live que nous avons étudié. Machiavel cherche dans
l'histoire ce qui peut appuyer sa thèse principale. Il semble nous
suggérer que la raison peut chercher des leçons dans l'histoire ,ou tout
au moins des sortes de preuves.)
Utilité de l'histoire =
Il reste que l'histoire nous permet de mieux voir. De plus c'est un
instrument de liberté dans la mesure où elle peut servir de modèle. En
ce sens Nietzsche que les grecs sont notre avenir ! L'histoire, à dose
convenable, peut guérir le moi de ses maladies:
De toute manière, quelle que
soit votre série, évitez d'éreinter l'histoire et de terminer votre
devoir sur un dénigrement !
Sans l'histoire il n'y aurait pas d'humanité.
Sens =
Le sens c'est à la fois l'orientation
et la signification:
a un sens ce qui a une fin lorsque les moyens sont bien ajustés à
la fin.
Pour Hegel, ce n'est pas l'homme qui fait l'histoire, il est trop occupé
à semer le désordre en suivant ses passions. La raison se réalise dans
l'histoire comme apparition progressive de l'Idée: c'est une sorte de
main invisible divine qui utilise les passions des hommes pour se
réaliser.
Pour Marx, au contraire, c'est l'homme qui produit l'histoire mais,
l'homme est d'abord un produit de l'histoire. C'est donc une sorte de
cauchemar puisque la création se fait toujours dans une atmosphère
hostile: le problème c'est que c'est le même qui est à la fois
promoteur et hostile à la promotion. Cela le rend vulnérable.
Conclusion :
L'histoire
est le lieu de jeux de langage, de discussions passionnées, de
déchaînements de l'imaginaire: toute ces controverses (Louis XVI
était-il un bon serrurier ou un grand roi), (Napoléon a-t-il
existé?), sont l'exercice d'une liberté de penser aventureuse. Il est
vain de croire que l'ouverture des archives transformerait l'histoire en
science objective parce que, rien ne prouve que tout a été archivé et
parce que, un texte relèvera toujours d'une interprétation (par exemple
le rôle de Pie XII pendant la deuxième guerre mondiale?)
Joseph Llapasset - Site
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