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LE CHÂTEAU DE BERENGÈRE
   conte pour enfant

Il était une fois, au temps des chevaliers, un château-fort dans une prairie, au bord d'une rivière. Il avait deux tours aux toits pointus couverts de tuiles de toutes les couleurs.


 En haut de la plus grosse tour, on voyait un grand coq. Il disait d'où vient le vent.  Et les gens savaient s'ils devaient enlever leur grosse veste, préparer du feu dans la cheminée, ou emporter leur parapluie: Quand le vent vient du sud, il apporte la chaleur, s'il vient du nord, il souffle le froid, s'il vient de l'ouest, il amène la pluie, s'il vient de l'est, il donne du courage au travail. Dans la tour du coq, vivait la fille du seigneur, Bérengère. 

Le seigneur s'appelait sire Guillaume. Il était très fier de sa fille et il avait bien raison. C'était la plus gentille fille du pays, et aussi la plus jolie. Beaucoup de chevaliers étaient venus la demander en mariage. Mais sire Guillaume n'arrivait pas à se décider: Celui-ci parlait du nez, celui-là avait l'air méchant, ce troisième avait un gros ventre, on voyait bien qu'il était gourmand, cet autre ne semblait pas très malin... Il y avait toujours une raison pour dire non. Et la pauvre Bérengère n'osait pas donner son avis. Un jour, le roi fit envoyer un messager: c'était la guerre! 
Le seigneur Guillaume devait partir retrouver les autres chevaliers, avec tous ses soldats. Pour consoler sa fille, il lui dit:
"Je vais chercher pour toi le meilleur mari du monde".  Et il partit. Il laissait sa fille, bien enfermée dans sa tour, pour que personne ne lui fasse de mal.
Elle restait avec son chat noir et son lapin roux. Avant de la quitter, Guillaume avait fait apporter un grand coffre dans sa chambre.
Il était rempli de beaux tissus de toutes les couleurs, de soie, de velours, de tulle, de laine, de lin, et de perles, et de pierres précieuses, et de fils d'or, et de tout ce qu'on peut inventer. Il avait dit: 
"Pendant que je serai parti, tu prépareras ta robe et celle des demoiselles d'honneur. Tu broderas des nappes, des rideaux, des draperies, tout ce qu'il faut pour décorer les tables, les murs, les fenêtres, Je veux que ton mariage soit une fête magnifique". 

Pour obéir à son père, elle s'était mise à coudre et à broder. Au début, elle avait des tas d'idées. Ca lui plaisait beaucoup de fabriquer toutes les belles choses qu'elle avait envie de faire: une robe couleur du jour et une robe couleur de nuit, comme la princesse de Peau d'Âne, des nappes décorées de fleurs, de fruits et d'oiseaux, des guirlandes de pompons et de rubans, des tapisseries qui représentaient des forêts, des montagnes, ou la mer, des colliers tressés de soie, de perles et de coquillages... Elle n'avait qu'à prendre ce qu'il lui fallait dans le coffre que son père lui avait laissé. Mais à la longue, tout ça devenait ennuyeux. 

Alors, elle se mit à rêver aux beaux chevaliers qui étaient venus la demander à son père. Celui qui lui plaisait le plus avait les yeux verts et les cheveux de la couleur du soleil qui se couche au bout de la mer. Elle ne savait même pas son nom.


Il semblait timide. 

 Au lieu de coudre, elle restait assise sans rien faire. Elle pensait à ce garçon aux yeux verts et aux cheveux couleur de soleil couchant. Elle ne brodait plus et elle oubliait quelquefois de manger. 

"Termine ton ouvrage", conseillait sagement le lapin roux. " "Mange, si tu veux rester jolie", ajoutait le chat noir, qui avait toujours faim. Le grand coq de la tour ne disait rien  Un soir, il étendit ses ailes d'or. Il s'envola vers le pays où se couche le soleil. Et il vit, assis sur le sable, un garçon aux yeux verts. 
"A qui penses-tu, garçon aux yeux verts? - 
 Je pense à Bérengère, qui est la plus gentille et la plus jolie au monde. - Pour gagner ta belle, as-tu du courage? - Je suis prêt à tout! - Monte sur mon dos, et tiens-toi bien fort!"    
 Et tous deux s'envolèrent vers la belle. 
Alors un grand vent se jeta sur eux, il venait du sud. Il soufflait le feu. Sur le dos du coq, le garçon peinait. La chaleur le serrait comme pour l'étouffer, mais il tenait bon.
Au bout de longtemps, le vent s'en alla. Un autre arriva, il venait du nord. Il soufflait le froid. Sur le dos du coq, le garçon peinait. Le gel avait pris ses bras et ses jambes, mais il tenait bon. Au bout de longtemps, le vent s'en alla. Un autre arriva, il venait de l'ouest. Il soufflait l'orage. Sur le dos du coq, le garçon peinait. La pluie et la neige mordaient sa figure, mais il tenait bon. Au bout de longtemps, la pluie s'arrêta. 

Enfin, arriva un vent tout joyeux, il venait de l'est, Il apportait courage et récompense. En deux grands souffles, il ramena les voyageurs au château . Dans la cour, c'était tout un remue-ménage: Guillaume venait de rentrer de la guerre! Il s'était bien battu, il avait chassé les méchants du pays. Il rapportait à Bérengère des cadeaux magnifiques. Mais il n'avait pas trouvé de mari pour elle: Aucun ne lui plaisait assez! 

Alors le garçon aux yeux verts s'avança, et Bérengère le reconnut. Guillaume ouvrit de grands yeux, Il envoya même chercher ses lunettes pour mieux le voir. Et il ne lui trouva aucun défautIl ne parlait pas du nez, il n'avait pas l'air méchant, Son ventre était plat et musclé: rien d'un gourmand! 
Il ne semblait pas bête du tout. Il serait sûrement le meilleur mari du monde. D'ailleurs, tout était prêt. 
Le
lapin roux avait décoré les salles et les tables. La mariée et les demoiselles d'honneur n'avaient qu'à enfiler leurs belles robes. 

Le chat noir avait organisé le festin. 
Et ce fut un mariage magnifique.

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